A la tête de deux agences emblématiques de l’industrie du mariage français, Estelle Monnot est l’une des premières wedding planners que j’ai souhaité interviewer.
Elle ouvre sa première agence, MC2 Mon Amour, il y a 6 ans avec la volonté d’être éclectique. Elle organise donc des mariages très différents et ce dans toute la France et à l’étranger pour 4 ou 300 personnes sur un thème champêtre, romantique, tropical… selon les désirs des mariés.
95% des couples sont français pour un budget de 20 000€ à 80 000€.
En 2017, elle fonde Estelle Monnot Events, une agence plus exclusive dédiée essentiellement aux mariages haut de gamme des couples étrangers souhaitant s’unir en France pour des budgets démarrant à 100 000€. Et jusqu’à présent le plus gros budget que son agence ait eu à traiter était d’un peu plus d’un million d’euros.
Les mariages qu’elle organise ne font pas juste rêver, ils transportent dans un univers singulier. C’est à chaque fois magique…
Que faisais-tu avant de te lancer dans le mariage et comment t’es tu lancée ?
J’étais Juriste. J’organisais des conférences en droit fiscal dans des grands hôtels parisiens à destination des experts-comptables, avocats, chefs d’entreprise…
J’ai toujours douté de ma capacité à aimer la vie en entreprise. Effectivement, après un an et demi de salariat, je ne voulais plus de cette vie. Je voulais être maître de mon emploi du temps, ne pas m’ennuyer…
As-tu suivi une formation d’organisation de mariage ou plus largement d’événementiel ?
Aucune formation. Pendant mes études et pendant mon année de juriste, j’étais déjà dans l’événementiel. J’ai coordonné des soirées dans des clubs parisiens. J’ai géré des équipes au sein de showroom pendant la fashion week parisienne. J’ai organisé des stands d’exposition… Le mariage c’était donc un domaine de plus pour moi.
Je suis persuadée qu’être une bonne wedding planner est surtout lié à notre personnalité : rigueur, sens du service, adaptabilité…
Te souviens-tu du tout premier contrat que tu as signé ?
Pas du tout ! En toute honnêteté, les premiers contrats étaient un peu inexistants car c’était pour des amis ou collègues. En revanche, je me souviens des premiers contrats que nous avions remporté face à des agences que j’admirais avant de me lancer. Pour moi, c’était un gage de qualité sur l’image que l’on renvoyait et donc la confiance qu’on nous accordait face à des agences qui existaient depuis plus longtemps ou qui étaient très visibles sur les réseaux sociaux ou les blogs. C’était la preuve du chemin parcouru, la récompense des efforts fournis.
Quelle est la plus grande difficulté à laquelle tu as dû faire face au début ?
Toujours la même difficulté : l’administratif et la comptabilité. Je déteste ça alors je repousse, je repousse jusqu’à être au pied du mur et ne plus avoir le choix.
Au bout de combien de temps as-tu réussi à te dégager un salaire grâce à l’organisation de mariage ?
Au début, nous étions deux. Au bout d’un an, on se payait 500€ par mois. Plus l’entreprise se développait plus nous augmentions nos revenus. Parfois, on ne pouvait pas se payer lorsque l’on faisait face à une difficulté de trésorerie.
Quel conseil aurais-tu aimé recevoir à tes débuts ?
Apprends à dire NON. Je ne l’ai pas fait pendant longtemps. Cela t’use et dévalorise ton travail. Aujourd’hui je ne le fais pas toujours car je suis comme ça tout simplement… mais je m’améliore de jour en jour.
J’ai appris que ne pas dire NON à un client qui en demande toujours plus par exemple, c’est dire NON à mon temps personnel (du temps avec mes enfants, mes amis ou mon mari) ou dire NON à un autre client car je n’ai plus assez de temps à consacrer à un nouveau projet.
D’après toi, qu’est ce qui fait le succès de MC2 Mon Amour ?
Dans un premier temps, nous sommes arrivées dans un contexte moins concurrentiel qu’aujourd’hui. Ensuite, nous avons beaucoup travaillé au départ sur notre communication : shooting, publication des mariages sur les blogs, présence dans les annuaires, participation à des salons du mariage…
Ensuite, nous avons pu obtenir la confiance de couples qui avaient de très belles envies. Nous avons pu travailler avec des prestataires talentueux qui nous recommandent d’ailleurs toujours beaucoup. Ce succès, nous le devons aussi beaucoup au bouche à oreille.
Et puis, les mariages très différents que nous avons pu organiser et notre expérience. Je peux aussi perdre des contrats « à cause » de cette expérience. Nous savons très bien aujourd’hui ce que l’organisation d’un mariage complet signifie. Il y a des tarifs pour lesquels nous ne voulons plus travailler. Alors nous perdons beaucoup de contrats car notre proposition tarifaire est plus élevée.
Ta plus grande fierté dans ton parcours ?
En tant que chef d’entreprise : être toujours là au bout de 6 ans car c’est un métier ingrat et le business model fait que c’est compliqué de tenir dans la durée. Le nombre de wedding planners ne cesse d’augmenter avec une conséquence assez néfaste : tirer les prix vers le bas.
En tant que wedding planner : avoir organisé un mariage à l’Opéra Garnier à Paris. C’est après ce mariage très luxueux que j’ai crée Estelle Monnot Events car la clientèle est très différente.
Comment choisis-tu les prestataires avec qui tu travailles ?
Je pense que le premier contact est très important, que ce soit en face à face, au téléphone ou par mail. Nous n’imposons aucun prestataire donc ce sont les clients qui ont le choix final parmi les propositions que nous leur faisons. Evidemment je suis parfois déçue d’un prestataire.
Où puises-tu ton inspiration ?
Pas mal dans la mode car c’est un domaine dans lequel je travaille aussi et qui m’a toujours beaucoup attirée. Ensuite lors de mes voyages. Je voyage dès que je peux. Lorsque je n’ai aucun voyage prévu sur 3 mois, ça ne me convient pas !
Ce que tu préfères dans ton métier de wedding planner ?
La relation avec les couples. Certains sont devenus des amis. Avec d’autres on s’écrit ou s’appelle de temps en temps…
Ton plus beau souvenir de wedding planner ?
J’en ai beaucoup aujourd’hui. Je ne saurais pas choisir : il y a eu les fous rires sur la route avec mon équipe, les câlins avec les mariés, le moment où tu apprends que le blog inaccessible va publier ton mariage, l’appel d’un couple qui te dit qu’il te choisit toi pour les suivre, les moments de danse sur la piste quand on a encore l’énergie… Et parfois les moments de galère deviennent des anecdotes rigolotes qu’on se remémore autour d’un cocktail avec les filles.
Arrives-tu à concilier vie pro et vie perso ? Comment ?
Pas toujours. On fait un métier atypique. Dans l’événementiel, tu ne maîtrises pas toujours tes horaires. Lorsque les mariages s’enchaînent, il peut y avoir des imprévus, il faut les gérer. J’ai parfois eu l’impression de donner un salaire à ma nounou, ou de transformer mon mari en père célibataire et parfois j’ai l’impression d’être très privilégiée. Je peux les déposer à l’école, aller les chercher tôt, avoir des moments hyper qualitatifs avec eux parce que je n’ai pas besoin de courir pour les courses, le dîner, les devoirs, le coucher. Mon emploi du temps peut être très variable et ils l’ont parfaitement intégré. Aujourd’hui je ne culpabilise plus. Je fais de mon mieux et parfois faire de son mieux, ça veut aussi dire me choisir moi et donc m’organiser une soirée en amoureux avec mon mari, partir en week-end avec des copines, m’assurer que le nounou les a bien endormi avant que je rentre…
Aujourd’hui où en es-tu ? Combien de mariages as-tu organisé/coordonné/décoré… ?
Nous avons déjà organisé plus de 13O mariages. Aujourd’hui je suis seule associée. Je fais appel à des wedding planners indépendantes pour m’aider à absorber le nombre de demande.
Quelle sera la prochaine étape ? Comment va/peut évoluer ton agence ?
Structurer, structurer, structurer… Idéalement j’aimerais embaucher quelqu’un à temps plein mais les charges sont bien trop importantes en France. Je souhaite donc augmenter le nombre de free lance travaillant pour MC2 mon amour. En moyenne, nous organisons entre 20 et 30 mariages par an. J’aimerais passer à une 40 aine de mariages pour 2021.
Et dans 10 ans, où seras-tu ?
Sur une plage à vendre des noix de coco ! J’aspire de plus en plus à une vie simple, au soleil… Soit je dirigerai l’agence MC2 mon amour à distance avec une quinzaine de wedding planners dont certaines en CDI. Soit j’aurais revendu l’agence MC2 mon amour.
Pour Estelle Monnot Events, je me dis que je pourrais organiser deux ou trois mariages prestigieux par an, pas plus… J’ai d’autres projets, toujours autour du mariage. A voir si je les aurais développé d’ici là…
Wedding planner ou wedding planneuse ? Quand j’entends wedding planneuse, je leur demande s’ils disent baby sitteuse.
Si tu n’étais pas wedding planner, tu serais… Créatrice de mode
L’indispensable pour un mariage réussi c’est… L’amour
Pour être une bonne wedding planner il faut… Du bon sens !
L’outil indispensable à toute wedding planner ? Une voiture
La chose la plus folle que tu ais faite pour tes mariés ? Revenir plus tôt d’un mariage à l’étranger, donc prendre un billet aller simple à 1000€ juste pour voir mes mariés qui avaient une crise d’angoisse.
Wedding planner c’est… Un métier difficile mais c’est un beau métier qui ne cesse d’évoluer.
Crédit photo portraits d’Estelle en Une : Violette Tannenbaum